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Qu’est-ce que le Design Thinking ?

Une approche centrée utilisateur

Le Design Thinking est une approche de l’innovation centrée sur l’utilisateur/l’humain. La vocation première de cette démarche, c’est d’identifier et résoudre des problèmes (problem solving) en s’inspirant de la pensée du Designer au sein d’une approche collaborative et co-créative. ✨

Dans cet article, nous vous proposons de partir des années 60 et de remonter l’histoire du Design Thinking jusqu’à nos jours. Vous découvrirez l’évolution du Design Thinking à travers des grands noms du domaine : Herbert A. Simon, Richard Buchanan ou encore Tim Brown. Ce dernier propose un processus de création de produits en 3 étapes. L’occasion de l’explorer et de découvrir d’autres méthodes proposées par Rolf Faste, le Hasso Plattner Institute of Design de Stanford et Nielsen Norman Group.

Définition du Design Thinking

Définir le Design Thinking n’est pas si aisé. Il n’existe en effet pas de réel consensus sur ce qu’est le Design Thinking parmi ses adeptes. En effet, le Design Thinking est un concept protéiforme, à la fois idéologie, méthodologie et forme organisationnel.

Trois conceptions principales sont identifiées.
Le Design Thinking en tant que style cognitif, en tant que théorie générale du design et en tant que ressource pour les organisations.

Rethinking Design Thinking

Sa définition simplifiée pourrait être : une démarche qui vise à créer des produits (ou des services) innovants en cherchant avant tout à répondre aux problèmes/besoins des utilisateurs finaux 👪

L’objectif du Design Thinking est de s’approprier la pensée et la boîte à outils du designer pour trouver des solutions à des problèmes sociaux et économiques au sein d’une stratégie de l’innovation centré sur l’humain.

Design thinking is a human-centered approach to innovation that draws from the designer’s toolkit to integrate the needs of people, the possibilities of technology, and the requirements for business success.

TIM BROWN, IDEO

Ainsi le Design Thinking est une “idéologie” qui considère qu’avoir une approche pratique et centrée utilisateurs pour résoudre des problèmes mène à l’innovation. Cette démarche se retranscrit donc sous la forme de méthodologies mais aussi d’organisation, voire de culture à implémenter au sein de l’entreprise.
En effet, comme nous le verrons un peu plus tard, le Design Thinking implique de mettre en place des pratiques de co-création ainsi que des processus de production et de décision cycliques et itératifs.

Les grands principes du Design Thinking

📜 Voici les grands commandements d’une approche Design Thinking :

  1. Chercher à résoudre des problèmes. 
  2. Mettre l’humain au cœur de la démarche.
  3. Itérer (résoudre un problème par approximations successives).
  4. Faire de l’erreur une force.
  5. Encourager la créativité et la cocréation.
  6. Diffuser l’état d’esprit du designer au sein des organisations.

Histoire et origine du Design Thinking

Impossible d’être exhaustif tant le Design Thinking puise ses racines dans de nombreux courants de pensée. Néanmoins connaitre son histoire est un excellent moyen de comprendre le concept du Design Thinking et son succès. Nous vous proposons donc un aperçu de l’histoire récente du Design Thinking.

Années 60-70

Avant les années 60, le métier de Designer, en tout cas tel qu’on l’entend aujourd’hui, n’existe pas. La conception de produit est, à l’époque, soit l’affaire des ingénieurs essentiellement focalisée sur les aspects de contraintes de fabrication, soit celle d’artistes qui se concentrent majoritairement sur des questions esthétiques. Rarement donc, l’usage et l’expérience ne sont prises en compte dans les processus de conception.

Aux USA, le design industriel et la product design font de timides premiers pas pour se détacher de l’ingénierie et des sciences. 
Pour autant, le design reste majoritairement un domaine exclusif aux experts et très largement cantonné à une vision fonctionnelle et analytique.

En parallèle, en Europe, le design coopératif scandinave commence également à décoller.

De nombreux projets très innovants comme Utopia naissent alors. Ce dernier a pour objectif d’aider les travailleurs, les syndicats, les lieux de travail et les services gouvernementaux à faire face à l’évolution de l’environnement de travail, en réaction à l’introduction de nouvelles technologies.
À l’inverse de la direction prise aux USA, la vision scandinave du Design, qui a plus tard été popularisée sous le terme de participatory design (design participatif), donne la voix à tout le monde, experts ou non, dans le processus de conception. Les designers deviennent donc des guides/facilitateurs. C’est aussi l’émergence des premiers processus de co-conception impliquant des utilisateurs réels et des logiques de recherche et développement par tests et explorations (learning by doing…).

1969, Herbert A. Simon théorise le design

📅 En 1969, l’économiste et sociologue Herbert A. Simon fait du design une manière de penser dans son ouvrage The Sciences of the Artificial. En précurseur, il théorise le design comme une pratique visant à résoudre les problèmes humains (human problem solving).

Everyone designs who devises courses of action aimed at changing existing situations into preferred ones.

Herbert Simon, The Sciences of the Artificial

Au début des années 1970, le théoricien Horst Rittel lance un défi aux concepteurs pour passer de la résolution de problèmes simples à celle des “problèmes vicieux” (Wicked problem), c’est-à-dire complexes et ambigus.
En ce faisant il est l’un des premiers à essayer de théoriser le design en se concentrant sur les méthodologies de conception au sein desquelles il donne une place centrale à la perception et à l’expérience humaine.

1973, une date à retenir

📅 Une date qui marque son temps : en 1973, Robert H. McKim publie Experiences in Visual Thinking. Selon l’auteur, il faut employer les capacités d’analyse de l’hémisphère gauche et la créativité offerte par l’hémisphère droit pour bénéficier d’une approche holistique d’une problématique – l’approche holistique s’intéresse à son objet dans sa globalité. In fine, cela permet de trouver plus efficacement la solution à cette problématique.

Années 80

Au milieu des années 1980, le cooperative design scandinave débarque aux États-Unis où la méthode deviendra plus largement connue sous le nom de “participatory design”.

En parallèle, les designers continuent d’être les sujets d’études de chercheurs désireux d’y trouver comment leur viennent leurs idées et le processus de conception à suivre pour générer de l’innovation. On peut notamment cité les travaux de Nigel Cross qui publie en 1982 dans la revue Design Studies l’article Designerly ways of knowing ou encore The reflective practitioner : how professionals think in action de Donald Schön publié l’année suivante. Ces deux auteurs vont avoir une énorme influence sur l’émergence d’une pensée design et la promotion des méthodologies de design.

C’est aussi dans les années 80 que Rolf Faste, professeur de design à l’université Stanford, reprenant les travaux de McKim, va dans ses cours proposer une première définition du Design Thinking comme une méthode d’action créative visant à résoudre des problèmes. Il sera ainsi le premier à proposer un processus de Design Thinking en 7 étapes (que l’on vous présente un peu plus tard dans cet article).

Années 90

Au début des années 1990, le design continue d’élargir son champ d’application. Il ne concerne plus uniquement la conception d’objets, de machines, ou encore de bâtiment. Désormais le design sert aussi à concevoir des services ou encore des interactions humaines.

Cet élargissement du périmètre du designer a été soutenu par l’article fondateur de Buchanan, Wicked Problems in Design Thinking, qui explorait le potentiel du design pour relever des défis complexes et ambigus. 
D’après ses travaux, le designer apporte une façon unique d’aborder un problème et de trouver des solutions.

The subject matter of design is potentially universal in scope,
because design thinking may be applied to any area of human experience. But in the process of application, the designer must discover
or invent a particular subject out of the problems and issues of specific circumstances

Autre date marquante : la création d’IDEO en 1991. Cette agence américaine marque alors l’histoire du Design en concevant, entre autres, le Grid Compass. Il s’agit du premier ordinateur avec un écran qui se referme sur le clavier. L’équipe d’IDEO a aussi conçu la première souris d’Apple.

C’est aussi la première agence qui va réellement communiquer sur ses méthodes de Design et populariser les notions de Design Thinking et de design centré sur les humains.

Des années 2000 à aujourd’hui

Depuis les années 2000, et notamment lors de la dernière décennie, le Design Thinking n’a eu de cesse d’évoluer et se diffuser massivement.

En 2004 Bruce Nussbaum met IDEO en une de BusinessWeek avec son article “The power of Design”. C’est la consécration du design en tant qu’axe stratégique de développement business et levier d’innovation.

Fondation de la première école dédiée au design thinking

L’année suivante, David M. Kelley (fondateur d’IDEO) créé, avec le soutien de l’entrepreneur allemand Hasso Plattner (cofondateur des logiciels Sap), la d.school à l’université de Standford. Il s’agit de la première école dédiée au design thinking qui deviendra rapidement mondialement reconnue.

En 2006, Nigel Cross revient sur le devant de la scène avec la publication de son livre Designerly ways of Knowing. Cet ouvrage, éponyme de son article de 1982, est un recueil révisé et édité de parties essentielles de ses travaux publiés au cours du dernier quart de siècle. Ainsi le livre s’intéresse à la façon dont les designers pensent et prennent des décisions et deviendra rapidement un véritable classique légitimant le concept de pensée design.

The intersection where design thinking lives diagram

Le designer Tim Brown, actuel CEO d’IDEO, va rapidement rejoindre David Kelley dans le club restreint des porte-paroles iconiques du design thinking en multipliant les prise de paroles et les publications.

  • Le 19 décembre 2007 il donna une conférence remarquée intitulée « Strategy by Design: How Design Thinking Builds Opportunities » à l’université de Stanford ,
  • L’année suivante il publie son article “Design Thinking” dans le célèbre Havard Business Review
  • En septembre 2009 sort son ouvrage Change by Design, rapidement devenu un incontournable chez les designers, tandis que son intervention, un peu plus tard la même année, aux conférences TED finira d’assoir sa popularité et de propulser le Design Thinking sur le devant de la scène.

Au fur et à mesure qu’il gagne en popularité, de nouveaux contributeurs participent à enrichir l’approche Design Thinking à des fins commerciales. Ces contributions vont notamment s’attacher à rendre plus compréhensibles et transparents les outils et processus créatifs du Design Thinking, aidant à sa rapide démocratisation et son adoption dans tous les secteurs.

Google trends. | Évolutions du nombre de recherches sur les mots clés Designt Thinking dans tous les pays depuis 2004

💡 Pour découvrir d’autres ouvrages inspirants, consultez notre article sur les meilleures ressources sur le Design Thinking.

Les avantages de développer le Design Thinking au sein des organisations

Comme nous l’avons vu, le Design Thinking est d’abord un état d’esprit, une démarche (au sens plein du terme). Son succès et son adoption massive peut s’expliquer par les avantages qu’elle offre pour les organisations qui l’adopte :

Créer de la convergence entre les équipes et installer une nouvelle culture basée sur la recherche, la créativité, le test et l’itération !

Le Design Thinking est pensé pour des équipes multidisciplinaires. Ainsi il permet de limiter les effets de silo et de compétition qui peuvent exister au sein des différents pôles d’une entreprise en faveur d’une très forte collaboration et de la valorisation des contributions de tous autour d’un objectif partagé. Le design devient l’affaire de tous.

Accélérer les processus d’innovation.

En promouvant la mise en place de processus cycliques et itératifs et raccourcis, le design thinking implique de penser vite et de tester rapidement ses hypothèses. Le droit à l’erreur est fondamental dans la démarche. Mais c’est parce qu’on peut se tromper, et qu’on apprend de ses erreurs, qu’il est essentiel d’avoir des prises de décisions et des expérimentations rapides. Cette remise en question permanente du statu quo se révèle la meilleure arme pour innover de manière permanente.

Mettre les utilisateurs au centre de la démarche (user centric).

L’empathie utilisateur, au centre de l’idéologie du Design Thinking permet d’assainir les décisions. En se focalisant sur la résolution de problèmes d’utilisateurs réels, vous serez en mesure d’innover suffisamment pour vous différencier et vous conférez de véritables avantages compétitifs. 📱

Process Design Thinking – Les étapes de création d’un produit ou d’un service

Comme nous l’avons évoqué, le Design Thinking a été conceptualisé sous différentes formes de méthodologies et processus, afin de rendre son application pratique plus simple à mettre en place.

Découvrez 4 processus de co-création de produits proposés par de grands noms du Design Thinking : Rolf Faste, la d.school de l’université de Stanford, Nielsen Norman Group et Tim Brown d’IDEO. 

Les 7 étapes de Rolf Faste

Le designer américain a apporté des contributions majeures aux domaines du design centré sur l’humain. Dans les années 80, cet enseignant de l’université de Stanford a proposé 7 étapes de conception d’un produit :

Les étapes du design thinking selon Rolf Faste
  1. Définir
    Repérer un problème et déterminer ce qui peut le résoudre.
  1. Rechercher.
    Rassembler les experts de différents domaines (designers, experts en marketing…) et coucher sur le papier le problème avec précision.
  1. Imaginer.
    Brainstormer en favorisant les débats et la récolte d’idées.
  1. Prototyper.
    Créer des prototypes et des schémas des idées récoltées.
  1. Sélectionner.
    Inviter les membres de l’équipe à voter pour la meilleure des idées issues des précédentes phases.
  1. Implémenter.
    Réaliser le projet en tenant comptes des contraintes et en mettant en place l’organisation adéquate.
  1. Apprendre.
    Récolter les retours des utilisateurs réels et améliorer le résultat en fonction de ces derniers.

Les 6 étapes de Nielsen Norman Group

Nielsen Norman Group est une société américaine de conseils en interface utilisateur et expérience utilisateur. Elle propose 6 étapes pour concevoir un produit pratique et centré sur l’utilisateur.

  1. Empathie.
    Faire des recherches pour se mettre dans la peau et la tête des utilisateurs.
  2. Définition.
    Identifier et cerner un problème d’utilisateur à résoudre pouvant générer de l’innovation.
  3. Idéation.
    Passer par une étape de brainstorming et récolter le maximum d’idées, bonnes ou mauvaises, sans jugement. Ensuite : en définir une qui semble être le plus en phase avec les besoins et désirs des prospects.
  4. Prototypage.
    Créer un premier prototype, même incomplet de vos idées
  5. Tests.
    Faire essayer le prototype pour avoir des retours concrets sur sa capacité à répondre aux besoins de vos utilisateurs. Améliorer-le pas à pas en fonction des retours.
  6. Implémentation. 
    Rendre concrète la vision.

La résolution de problèmes peut mener à l’innovation, et l’innovation peut mener à la différenciation et à un avantage concurrentiel. 

Un schéma composé de boucles de rétroactions

Le schéma proposé par Nielsen Norman Group n’est pas linéaire. Il y a de nombreuses boucles de rétroactions entre les différentes étapes. Au-delà du sens linéaire (de 1 à 6), on retrouve certaines autres interactions :

  • L’implémentation (fin de parcours) renvoie directement à l’empathie. 
  • Les tests renvoient au prototypage (on remet au point un prototype suivant les résultats des tests précédents).
  • Le prototypage renvoie à l’empathie et à l’idéation.
  • L’idéation renvoie à la définition.
  • La définition renvoie à l’empathie.
Les itérations au sein du process du Nielsen Norman Group

Les 5 étapes de la d.school de l’université de Stanford

La d.school de l’université de Stanford, aussi nommé « Hasso Plattner Institute of Design de Stanford », divise le processus de co-création en 5 étapes.

  1. L’empathie.
  2. La définition.
  3. L’idéation (formation et enchaînement des idées).
  4. Les prototypes.
  5. Les tests.
Les étapes du design thinking selon la d.school

🤲 L’empathie… Cette notion est importante, dans un cadre où le design du produit vise à satisfaire les besoins des utilisateurs finaux. Dans une logique mercantile, placer les consommateurs au centre du processus de création sert à : 

  • Rendre la solution innovante adéquate aux attentes des utilisateurs.
  • Associer les perspectives technologiques aux besoins/motivations des clients.
  • Créer de la connivence entre la marque et les consommateurs.
  • Mieux comprendre et enrichir l’expérience utilisateur en analysant des faits concrets.
  • Accroître ses connaissances personnelles (en tant que designer de produits). 
  • Favoriser l’esprit d’équipe en interne.

Les 3 étapes Design Thinking de Tim Brown

Tim Brown, d’IDEO, minimalise cette pensée schématique et propose… 3 étapes.

  1. Inspiration.
    Repérer le problème du consommateur qui pourrait être résolu grâce à l’observation du contexte et des comportements. On retrouve ici la logique d’empathie précédemment évoquée.
  1. Imagination ou idéation.
    Générer des idées collectivement, les développer et les faire essayer.
  1. Implémentation.
    Fabriquer, concrétiser le produit ou le service. Pour Tim Brown, entre alors en jeu l’art du storytelling, soit la création d’une histoire autour du produit afin de lui donner de la profondeur, une âme, une identité forte.

Alors quelle méthode de product design choisir ?

On remarque une certaine ressemblance entre les différentes méthodes Design Thinking évoquées ci-dessus (Rolf Faste, la d.school de l’université de Stanford, Nielsen Norman Group, Tim Brown). 

Ainsi chez Clint, on a tendance à considérer ces applications comme des repères, qui vont aider à mettre en place cette pensée design, plus que comme des préceptes à respecter à la lettre.

Aucune méthode n’est meilleure que l’autre tant qu’elle fonctionne pour vous et qu’elle respecte l’idéologie du Design Thinking.

Plusieurs méthodes peuvent d’ailleurs coexister voire s’interchanger au sein d’une même organisation ou d’un même projet.

Il convient donc d’adapter ces approches méthodologiques et de les intégrer dans votre processus de product design. En effet, il est tout à fait possible de fusionner une approche méthodologique du Design Thinking avec une approche Lean UX, Growth hacking etc…

Si comme nous vous êtes convaincu de la valeur que cette démarche peut vous apporter, nous vous proposons de rentrer un peu plus dans les détails des grandes étapes de la méthodologie Design Thinking.

Et si vous n’êtes toujours pas rassasiés, n’hésitez pas à jeter un coup d’oeil à notre sélection des meilleures ressources autour du Design Thinking.

Marie Auguy

Chargée de communication

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